Gilbert Rist
Gilbert Rist est professeur à
l'Institut universitaire d'études du développement (IUED, Genève).
Après avoir enseigné à Tunis, il a notamment dirigé le Centre Europe
Tiers Monde (CETIM). Il travaille à une anthropologie de la modernité
qui fait apparaître la société occidentale comme aussi traditionnelle
et exotique que les autres.
Le présent texte constitue le chapitre 4 du livre de Gilbert Rist,
Le
Développement, histoire d'une croyance occidentale, Presses de
Sciences Po, Paris, novembre 2001.
Un ouvrage de référence, traduit en anglais (Zed Books, 1997), en
italien (Bollati Boringhieri, 1997) et en espagnol (Los Libros de
la Catárata, à paraître en 2002).
Ce texte est extrait du
numéro spécial de la revue L'écologiste
n°6.
La
seconde guerre mondiale avait tout bouleversé. L'Europe avait dû s'en
remettre, pour se libérer du nazisme, au secours de nouvelles puissances,
les Etats-Unis et l'URSS, et celles-ci, pour des raisons diverses,
n'avaient aucun intérêt à protéger l'existence d'empires coloniaux.
Avant la fin du conflit, la défunte SDN [Société des nations] avait
été remplacée par l'ONU, dont le siège principal se trouvait signe
des temps à New York et non pas à Genève. La découverte, certes tardive,
des camps de concentration avait dévoilé les atrocités auxquelles
pouvait conduire la prétention d'une race à en dominer d'autres. Et,
avec la condamnation du racisme, c'était la notion de race elle-même
qui était mise en question. Une nouvelle Déclaration univer-elle des
droits de l'Homme rappelait l'égalité de tous, émancipant d'un coup
tous ceux que l'on avait si longtemps maintenus sous tutelle comme
des pupilles ou des mineurs. D'ailleurs, ceux-ci n'avaient-ils pas
participé en grand nombre aux combats que se livraient les puissances
européennes et, à cette occasion, n'avait-on pas dû leur faire quelques
promesses que la victoire obligeait à tenir ?
Cela dit, dans l'immédiat après-guerre, les problèmes les plus urgents
ne semblaient pas se situer au Sud, mais au Nord. Il y avait d'abord
la reconstruction de l'Europe en ruine. D'où le lancement du plan
Mar-shall, le 5 juin 1947, pour venir en aide à l'économie européenne
et fournir des débouchés au gigantesque potentiel américain de production
qu'il fallait recon-vertir après la fin du conflit. Mais il y avait
aussi la brouille naissante entre les alliés d'hier, les prétentions
staliniennes en Europe avec le basculement dans le camp des "démocraties
populaires" de la Pologne (1947), de la Roumanie (1948), de la Tchécoslovaquie
(1948) et de la Hongrie (1949), sans oublier la guerre civile en Grèce
(1946-1949). En 1948, les Soviétiques mettaient en place le blocus
de Berlin. La guerre froide exigeait des mesures préventives sérieuses
qui devaient déboucher sur la création de l'OTAN. Les préoccupations
politiques des grandes puissances étaient donc accaparées par des
événements qui modifiaient considérablement les relations poli-tiques
européennes, faisant passer à l'arrière-plan les transformations qui
avaient lieu au Sud. (1) C'est pourtant dans ce contexte, apparemment
peu favorable aux préoccupations extra-occidentales, que fut inventée
la notion de "développement".
Le " Point
IV " du président Truman
A la fin de l'année 1948, la politique étrangère américaine
était en pleine effervescence, obligée de faire face aux changements
considérables qui survenaient un peu partout dans le monde ; simultanément,
le rédacteur des discours présidentiels s'efforçait de définir quelques
lignes claires qui puissent structurer le traditionnel "discours sur
l'état de l'Union" que le président Truman devait prononcer le 20
janvier 1949. Une première réunion dégagea trois idées qui firent
rapidement l'unanimité : les Etats-Unis continueraient de soutenir
la nouvelle Organisation des Nations Unies, ils poursuivraient leur
effort de reconstruction européenne à travers le plan Marshall et,
enfin, ils allaient créer une organisation commune de défense (l'OTAN)
pour faire face à la menace soviétique. A ces trois premiers points,
un fonctionnaire suggéra d'ajouter une extension aux nations défavorisées
de l'aide technique qui avait été jusqu'ici accordée à certains pays
d'Amérique latine. Après quelques hésitations, l'idée fut finalement
retenue parce qu'elle était originale et constituait un hochet médiatique,
au contraire des trois premiers points, assez conventionnels. Comme
on pouvait s'y attendre, au lendemain du discours présidentiel, la
presse américaine fit ses gros titres sur le "Point IV", même si personne
pas même le président ni le secrétaire d'Etat ne pouvait en dire plus
que ce que chacun avait lu. (2)
Or, en dépit du caractère anecdotique de l'épisode, le Point IV inaugure
"l'ère du développement" et il est significatif que l'idée ait été
proclamée d'abord par un président américain. Voici donc ce texte
fondateur (3) :
"Quatrièmement, il nous
faut lancer un nouveau programme qui soit audacieux et qui mette
les avantages de notre avance scientifique et de notre progrès
industriel au service de l'amélioration et de la croissance des
régions sous-développées. Plus de la moitié des gens de ce monde
vivent dans des conditions voisines de la misère. Leur nourriture
est insatisfaisante. Ils sont victimes de maladies. Leur vie économique
est primitive et stationnaire. Leur pauvreté constitue un handicap
et une menace, tant pour eux que pour les régions les plus prospères.
Pour la première fois de l'histoire, l'humanité détient les connaissances
techniques et pratiques susceptibles de soulager la souffrance
de ces gens.
Les Etats-Unis occupent parmi les nations une place prééminente
quant au développement des techniques industrielles et scientifiques.
Les ressources matérielles que nous pouvons nous permettre d'utiliser
pour l'assistance à d'autres peuples sont limitées. Mais nos ressources
en connaissances techniques qui, physiquement, ne pèsent rien
ne cessent de croître et sont inépuisables.
Je crois que nous devrions mettre à la disposition des peuples
pacifiques (4) les avantages de notre réserve de connaissances
techniques afin de les aider à réaliser la vie meilleure à laquelle
ils aspirent. Et, en collaboration avec d'autres nations, nous
devrions encourager l'investissement de capitaux dans les régions
où le développement fait défaut.
Notre but devrait d'être d'aider les peuples libres du monde à
produire, par leurs propres efforts, plus de nourriture, plus
de vêtements, plus de matériaux de construction, plus d'énergie
mécanique afin d'alléger leurs fardeaux.
Nous invitons les autres pays à mettre en commun leurs ressources
technologiques dans cette opération. Leurs contributions seront
accueillies chaleureusement. Cela doit constituer une entreprise
collective à laquelle toutes les nations collaborent à travers
les Nations unies et ses institutions spécialisées pour autant
que cela soit réalisable. Il doit s'agir d'un effort mondial pour
assurer l'existence de la paix, de l'abondance et de la liberté.
Avec la collaboration des milieux d'affaires, du capital privé,
de l'agriculture et du monde du travail de ce pays, ce programme
pourra accroître grandement l'activité industrielle des autres
nations et élever substantiellement leur niveau de vie.
Ces développements économiques nouveaux devront être conçus et
contrôlés de façon à profiter aux populations des régions dans
lesquelles ils seront mis en oeuvre. Les garanties accordées à
l'investisseur devront être équilibrées par des garanties protégeant
les intérêts de ceux dont les ressources et le travail se trouveront
engagés dans ces développements. L'ancien impérialisme l'exploitation
au service du profit étranger n'a rien à voir avec nos intentions.
Ce que nous envisageons, c'est un programme de développement fondé
sur les concepts d'une négociation équitable et démocratique.
Tous les pays, y compris le nôtre, profiteront largement d'un
programme constructif qui permettra de mieux utiliser les ressources
humaines et naturelles du monde. L'expérience montre que notre
commerce avec les autres pays s'accroît au fur et à mesure de
leurs progrès industriels et économiques."
Un nouvel
Evangile
L'intérêt du Point IV tient aussi à la manière dont
il est structuré. Il peut se décomposer en quatre parties d'inégale
longueur. La première rappelle la situation désespérée dans laquelle
vivent "plus de la moitié des gens de ce monde", soumis à l'horreur
de la faim et de la misère. Puis, à ceux qui sont ainsi perdus dans
une situation apparemment sans espoir, on annonce une bonne nouvelle
: "pour la première fois de l'histoire", quelque chose a changé qui
permet de transformer leur vie ; grâce à cette nouveauté inouïe, le
bonheur est à portée de main. A condition toutefois de mobiliser les
énergies, de produire plus, d'investir, de se mettre au travail, d'intensifier
les échanges. Alors enfin, si l'on saisit cette chance, si l'on consent
aux efforts demandés, alors s'ouvrira une ère de bonheur, de paix
et de prospérité dont tous profiteront.
Un évangéliste américain ne dirait pas autre chose. A ceux qui sont
livrés au péché et à la mort, Jésus-Christ annonce le salut, pour
autant qu'ils se conforment aux exigences de la foi car c'est ainsi
qu'ils pourront parvenir à la vie éternelle et jouir de la félicité
promise aux élus.
Le discours du président Truman était destiné d'abord à ses compatriotes
qui ne pouvaient être insensibles à cette manière de présenter l'histoire
du monde ; elle était en effet d'autant plus vraisemblable qu'elle
correspondait, sur le mode profane, à la vérité proclamée par l'Eglise.
Mais cette audience dépassait largement les Etats-Unis puisqu'elle
reposait sur une croyance partagée non seulement par le monde chrétien
mais, d'une certaine manière, par tous les adhérents d'une religion
de salut. (5)
En profitant de cette homologie de structure avec le discours religieux,
la nouvelle croyance au "développement" assurait sa crédibilité, que
renforçait encore la métaphore naturalisante, inscrite depuis si longtemps
dans la conscience (ou la non-conscience) occidentale. Voilà sans
doute pourquoi ce moule discursif sera sans cesse réutilisé dans de
nombreuses autres déclarations censées affirmer la nécessité du "développement"
comme unique solution aux problèmes de l'humanité. (6)
Du même coup, l'interrogation sur le "développement" deviendra impossible.
Certes, il sera loisible de débattre de ses modalités, des moyens
d' "accélérer la croissance" ou d'en répartir les effets de manière
plus équitable, mais le caractère transitif du "développement" c'est-à-dire
l'intervention qu'il représente dans les affaires internes d'une nation
ne sera pas mis en cause : on ne s'attaque pas à une croyance qui
détermine un programme visant au bonheur universel, on ne parle pas
de ce qui va de soi, tout au plus peut-on chercher à l'améliorer.
L'ère du " développement
"
Voilà donc bien des raisons de considérer le Point IV comme l'acte
inaugural d'une nouvelle ère. Non pas que la réalité soit créée par
les mots, mais parce que certaines formes du discours traduisent plus
fidèlement que d'autres la réalité en train de se faire, parce que
certains textes parviennent mieux que d'autres à mettre en évidence
l'épistémè d'une époque. Enfin, et c'est l'aspect performatif du texte,
parce que le pouvoir ne consiste pas nécessairement à transformer
la réalité, mais à la problématiser différemment, à en propo-ser une
nouvelle représentation pour provoquer l'illusion du changement. Tout
cela est ici réuni et marque par conséquent un moment important dans
l'incessante réinterprétation de la métaphore de la croissance : le
pouvoir appartient toujours à celui qui sait se rendre maître des
mots.
Certes, la transcription dans les faits du sens implicite véhiculé
par cette nouvelle interprétation de l'histoire prendra du temps.
De même qu'il avait fallu vingt ans pour convaincre l'opinion française
du bien-fondé de la colonisation, il en faudra autant pour faire apparaître
le "développement" comme le projet collectif de l'humanité tout entière.
La décolonisation sera l'occasion de conflits difficiles qui, souvent,
se régleront par les armes plutôt que par les mots. Il faudra aussi
que surgissent de nouvelles organisations internationales (par exemple
le Programme élargi des Nations Unies qui deviendra ensuite le PNUD,
Programme des Nations Unies pour le Développement) et de nouveaux
modes de gestion de la production pour que celle-ci se transnationalise,
que le marché s'étende à l'ensemble de la planète et que s'impose
l'idée d'une interdépendance des peuples.
Néanmoins, en quelques paragraphes, une stratégie globale est affirmée.
Bien qu'elle serve d'abord les intérêts particuliers de la nation
la plus puissante du monde, elle feint de ne se préoccuper que du
bien commun et présente le "développement" comme un ensemble de mesures
techniques (7) (utilisation du savoir scientifique, croissance de
la productivité, intensification des échanges internationaux) et donc
situées hors du débat politique ; ce qui permettra d'en donner selon
les lieux et les moments des interprétations conservatrices ou révolutionnaires.
(8)
De plus, en définissant le "sous-développement" comme un état de manque,
plutôt que comme le résultat de circonstances historiques, et les
"sous-développés" comme des pauvres, sans s'interroger sur les raisons
de leur dénuement, on fait de la croissance et de l'aide (9) conçues
en termes technocratiques et quantitatifs (10) la seule réponse possible.
Ainsi, à partir de 1949, plus de deux milliards d'habitants de la
planète vont le plus souvent à leur insu changer de nom, être considérés
"officiellement", si l'on peut dire, tels qu'ils apparaissent dans
le regard de l'autre et être mis en demeure de rechercher ainsi leur
occidentalisation en profondeur au mépris de leurs propres valeurs
; ils ne seront plus Africains, Latino-Américains ou Asiatiques (pour
ne pas dire Bambaras, Shona, Berbères, Quechuas, Aymaras, Balinais
ou Mongols) mais simplement "sous-développés". Cette nouvelle "définition"
fut acceptée par ceux qui étaient à la tête d'États indépendants,
car c'était une manière d'affirmer leur prétention à bénéficier de
l' "aide" qui devait conduire au "développement " ; pour ceux qui
étaient colonisés, c'était une façon d'affirmer l'égalité juridique
qui leur était refusée. En apparence, ils avaient tout à gagner :
la respectabilité et la prospérité. (11) Toutefois, leur droit à l'autodétermination
fut échangé contre le droit à l'autodénomination et, en conquérant
leur indépendance politique, ils perdaient leur identité et leur autonomie
économique, parce que contraints de cheminer sur la "voie du développement"
tracée par d'autres qu'eux. A la diffé-rence de la colonisation qui
considérait le monde d'abord comme un espace politique où il fallait
inscrire des empires toujours plus vastes, l'ère du "développement"
est aussi celle de l'avènement généralisé de l'espace économique (12),
à l'intérieur duquel l'accroissement du PNB constitue l'impératif
majeur.
Notes
(1) Ces transformations étaient
toutefois loin d'être négligeables : la Ligue des Etats arabes avait
été créée en 1945 ; en 1947, l'Inde était devenue indépendante ; l'abandon
du mandat britannique sur la Palestine en 1947 avait favorisé la création
de l'Etat d'Israël en 1948 ; la guerre civile chinoise se termina
en 1949 par l'arrivée au pouvoir de Mao Zedong ; l'Indonésie de Sokarno
se proclama indépendante en 1945 et devint république unitaire en
1950.
(2) L'anecdote est rapportée par Louis J. Halle, " On Teaching International
Relations ", The Virginia Quarterly Review, 40 (1), 1964, pp. 11-25.
Le discours présidentiel avait été prononcé le 20 janvier 1949. Une
semaine après, soit le 27 janvier, le président Tru-man répondait
à la presse qui l'interrogeait sur le " Point IV " : " Les membres
de mon gouvernement et moi-même songeons à ce Point IV depuis deux
ou trois ans, depuis l'inauguration du Plan Marshall [mais le plan
Marshall avait été lancé en juin 1947, soit une année et demie avant
le Point IV ! ]. Il tire son origine des propositions de la Grèce
et de la Turquie. Depuis, j'ai longuement étudié ces dernières. J'ai
passé le plus clair de mon temps à parcourir le globe pour trouver
comment instaurer la paix dans le monde. " Public Papers of the Presidents
of the United States, Harry S. Truman. Year 1949, 5, United States
Government Printing Office, 1964 (January 27), p. 118.
Bel exemple de mensonge opportuniste puisqu'en fait rien n'était vraiment
prévu et qu'il faudra attendre près de deux ans pour que l'Administration
américaine com-mence à réaliser le Point IV.
(3) Traduction établie sur la base des Public Papers of the Presidents.
op. cit. (January 20), pp. 114-115.
(4) Dans la charte des Nations Unies, les peace-loving peoples repré-sentent
les vainqueurs de la seconde guerre mondiale ; dans ce contexte, la
formule concerne les pays non-communistes. (cf. la notion de free
peoples au paragraphe suivant).
(5) Cf., à ce sujet Marie-Dominique Perrot, Gilbert Rist et Fabri-zio
Sabelli, La Mythologie programmée. L'Économie des croyances dans la
société moderne, Paris, PUF, 1992, p. 195 et suiv.
(6) Ibid., p. 196 - 197.
(7) Comme si la technique était idéologiquement neutre, comme si elle
pouvait s'acquérir sans contrepartie financière, comme si elle n'avait
aucun coût culturel, comme si elle ne portait pas en elle-même le
code génétique de la société qui l'a produite.
(8) Les " politiques de développement " peuvent remplir diverses fonctions,
selon qu'elles sont utilisées dans l'ordre interne (faire quelque
chose en faveur des " pauvres "), comme élément de la politique étrangère
(aide publique ou aide militaire) ou pour réu-nir un consensus dans
le cadre des organisations internationales. Lorsque les contradictions
politiques deviennent trop importantes, il est toujours possible de
mettre le " développement " à l'ordre du jour : les diverses manifestations
de la guerre froide privant l'ONU de toute possibilité d'intervention
dans les conflits militaires n'ont pas peu contribué à la promotion
du " développement ".
(9) La notion d' " aide " ou de don renvoie évidemment à des conceptualisations
différentes selon les cultures. Hors de la culture occidentale, recevoir
sans rendre signifie perdre la face et se placer dans la dépendance
du donateur ou mourir. Le don entre ainsi dans un processus de domination
dont le donateur (occidental) est d'autant moins conscient qu'il lui
attribue une valeur positive.
(10) D'une certaine manière, les États-Unis proposent de livrer la
" guerre à la pauvreté " avec les mêmes armes que celles qui ont permis
de remporter la victoire sur l'Allemagne et le Japon : la supériorité
du potentiel productif et la mobilisation des scientifiques (pour
fabriquer la bombe atomique). Ce qui a parfois entraîné la même logique
militaire : pour libérer la ville, il faut la détruire...
(11) Pour éviter tout malentendu, on rappellera que le " colonialisme
externe " (dit du " premier type ") a trop souvent été remplacé par
la colonisation interne, au profit des " élites " , et par la dépendance
externe (ou " colonialisme du deuxième type " ).
(12) En définissant le " sous-développement " comme un simple état
de manque, l'économisme imposait son ordre. Pour l'économiste, la
rareté située au fondement de sa " science " constitue un " donné
naturel " (plutôt qu'une construction sociale) qu'il s'agit de combattre,
même si ce combat est d'avance déclaré vain puisque les " besoins
" humains sont présupposés illimités (comme la croissance).